Oui à la ville durable, un interminable Oui !

La « ville durable africaine », celle qui nous oblige, doit être un modèle d’innovation et de créativité permanente. Elle doit porter en elle les germes de son développement et mobiliser les apports continus des gouvernements, des élus locaux, de la société civile, des médias et des populations, pour changer, dans son mouvement, la vie de ses habitants. Elle doit être stimulée par un foisonnement d’initiatives territorialement ancrées, et destinées à être réellement inclusives et à booster la capacité de ses habitants à « faire société ». Ne se limitant pas seulement à améliorer l’existant à la marge, ou à agréger des zones aménagées pour quelques ‘’élus’’ ; elle a pour unique défi de quitter les sentiers battus et de se refonder sur l’humain, dans la création d’espaces de vie, eux-mêmes vivants. En cela elle est une approche audacieuse, engagée et disruptive.

Oui, la ville durable pour l’Afrique est une question d’audace. Elle est un élan prométhéen, tranchant et transversal. Elle embrasse la modernité dans la compacité et explore les champs de l’éco-densité. Elle fait de l’urbanité un projet commun aux destins qui la forgent, et engage ces destins, dans le développement des moyens de transport collectifs, dans la construction à énergie positive et à empreinte carbone réduite, dans la protection de la biodiversité, dans le respect de la chose naturelle et des paysages, dans la réhabilitation des vieux quartiers, dans le maintien du lien social, de la vie.

La ville durable est complice des arts et de la culture. Elle décloisonne, entrelace, solidarise, et apporte de l’harmonie ; elle est un espace commun et partagé, le lieu des métissages, de l’hétérogénéité. La ville durable vit du mélange. Elle est autant à tous qu’elle est à chacun, s’enrichissant des apports des uns et des autres pour cavalcader sereinement dans le champ des possibles. Elle donne aux espaces une teneur, un contenu, une profondeur, qui sont également un langage qui s’adresse au cœur humain. Elle véhicule une identité, celle des sociétés qui s’y meuvent. Elle est richesse et ferment d’avenir ; elle est une âme vivante, un élan de liberté.

La ville durable est un lieu d’histoire. Elle favorise la rencontre, suscite et entretien le relationnel, les émotions, le vivre-ensemble, l’utopie, la construction de désirs et d’une destinée commune. Elle est un partenariat dans la réalisation d’objectifs partagés ; un mouvement, une organisation, un jeu d’acteurs. Elle est donc un sujet de développement, un projet de société qui ne se mesure qu’à l’aune de l’épaisseur de la matière urbaine, aussi complexe soit-elle. Emportée dans le flot de l’urbain qui se généralise et se démultiplie, passant d’une proximité revendiquée aux aires des agglomérations et des territoires ; la ville durable reste un souffle, un mouvement perpétuel qui se maintient, s’impose aux espaces et personnalise les lieux. Elle n’est pas une vérité absolue, in extenso, mais la réalité d’un projet infini, se renouvelant sur lui-même. A l’écoute de la société et de l’environnement, la ville durable allie les propositions de la vie aux demandes d’usage, car elle est corps et esprit.

La ville durable est un plaisir, dans l’esthétique des espaces, dans l’originalité, la sureté et la qualité des environnements qu’elle offre aux activités humaines. Elle fédère les esprits et les ardeurs, attise le sentiment d’appartenance à une communauté économiquement dynamique. Elle valorise l’arrière-pays et le patrimoine culturel des lieux qu’elle exhausse et vivifie.

Devant les relents catastrophiques du progrès, merveilleux, la ville durable plante un nouveau décor, fixe un nouveau cap, ranime un espoir agonisant et rétablit la conscience d’un monde fini. Elle redonne du sens à l’espace bouleversé par le temps, et néanmoins, condition de l’existence humaine. La ville durable c’est à la fois l’ici, le maintenant et la profondeur des perspectives. C’est l’alliage entre le pessimisme de la raison et l’optimisme de la volonté. Mais en toute chose, la ville durable africaine reste par essence la manifestation d’une volonté ardente, le gage d’un siècle et sans doute, de plusieurs générations. Osons les villes durables ! Sans trêve.

Beaugrain Doumongue, le socioingénieur

Beaugrain Doumongue est ingénieur du bâtiment, docteur en génie civil et physicien du bâtiment. Il se définit davantage comme un « socioingénieur » du fait de son engagement au profit du développement des bâtiments et villes durables en Afrique. Président de Construire pour demain, association de promotion des bâtiments et villes durables en Afrique, il est aussi cofondateur de Starksolutions, cabinet de conseil en intelligence territoriale et directeur du développement et de la prospective du Groupe scientifique SIGMA.

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